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La hora de la siesta de Carolina Platt
(Mexique, 2014· 1h25)
Comment parler d'une douleur collective atroce, sans sombrer dans le pathos ? D'un tabou anthropologique, sans provocation voyeuriste ? D'abord, dépasser la surface du sujet et cheminer en soulevant délicatement les voiles un à un. En voyant ce film, nous avons été subjugués par sa douceur et la multitude de questions intimes qu'il fait naître. La mort de quarante-neuf enfants dans l'incendie d'une crèche est bien évidemment bouleversante. Mais à travers le portrait de deux d'entre eux, mis en miroir de celui de sa fille, survivante de la tragédie, la réalisatrice ne nous laisse pas pétrifiés au bord du drame. Elle nous emmène plutôt dans les méandres de la vie, dans ce que Paul Guimard avait appelé l'ironie du sort : la disparition illogique d'êtres chers qui auraient pu vivre nous interroge sur la condition humaine en général, mais plus personnellement sur nos propres parcours, nos propres héritages et sur ce que nous voulons et pouvons laisser derrière nous. Jusqu'où sommes-nous acteurs de nos vies et pas seulement passants, mais passeurs de notre monde ? Ce sont ces chemins de pensées, à la fois classiques et si souvent délaissés, que la réalisatrice emprunte en observant comment chacun a continué devivre. Avec un sens inouï de la beauté des êtres et une sensibilité apaisante, comme une caresse perdue de notre enfance.
E.D