Portrait de Réalisactrice

Ana Katz est une réalisatrice, scénariste et actrice argentine, diplômée de l’Université du Cinéma où elle a également enseigné. Dans son premier film El juego de la silla (2003) Ana Katz dirige et interprète un des personnages. Au théâtre, elle a mis en scène une pièce humoristique qui est restée à l’affiche pendant trois ans.
Le cinéma d’Ana Katz déploie un sentiment d’incertitude, celui de l’imprévisibilité de la vie. Ses films se passent comme la vie, elle paraît réfléchir par rapport aux sujets les plus ordinaires. « Le dialogue entre mes fictions est inévitable. Le plus important pour moi c’est la question de fond, une sorte de boussole qui me permet de lire, de raisonner, d’analyser. Ce qui m’attire le plus dans un projet c’est quand il comporte une question à laquelle je ne sais pas répondre. »
C’est peut-être cette «question de fond» qui amène la cinéaste à souligner la relation entre le cinéma indépendant et les politiques culturelles dans son pays :  «  Nous sommes en train de traverser une situation difficile ; la politique nationale et internationale a tendance à négliger les espaces culturels et de ce fait l’identité culturelle. Plus que jamais nous, les réalisateurs et réalisatrices, avons besoin de soutien dans le but de renforcer une culture nationale qui, à cause de la globalisation, devient diffuse. Il faut récupérer le cinéma en tant que générateur d’une pensée et d’un sentiment. Pour moi, l’expérience cinématographique est irremplaçable : marcher vers la salle de cinéma, regarder le film et par la suite en parler avec d’autres gens, c’est ça l’aventure du cinéma! »
Sortes de comédies noires, ses histoires sont des variations entre humour et drame qui parviennent à nous confronter à la presque absurdité de nos quotidiens. Comme elle précise: « Notre monde est gouverné par l’absurde. […] Dans mes scénarios, le travail avec l’humour est constant. Il s’agit d’un outil principal, pour moi, de la même manière qu’une fourchette et un couteau. Sans l’humour je ne peux rien : il est inévitable […]je crois que l’humour est en moi, je ne le cherche pas. »
Ses personnages, des êtres sensibles, légèrement obsédés et fortement attachants, donnent l’occasion d’expérimenter tout un éventail d’émotions-sensations. « Les personnages que j’invente n’ont pas les idées très claires ou ils sont en train de traverser des moments de transformations, de désirs, de virages ou de changements, » dit la réalisatrice. « La direction des acteurs m’intéresse beaucoup. Il me plaît de tourner une scène et de me sentir comme un animal autour de sa proie… j’essaye de passer du temps avec les acteurs. En général, je cherche des comédiens avec un regard attentif. Cela vaut de l’or pour moi : l’acteur qui a son propre point de vue, l’acteur actif qui débat, qui propose, qui se laisse émouvoir intérieurement. »
Des premiers plans, la caméra toujours très proche, une atmosphère presque intime, des séquences d’images autant familières qu’insolites composent l’univers cinématographique de cette réalisatrice atypique. « Ce qui m’importe avant tout, ce sont les personnes. Il s’agit de personnes dans le genre de cinéma que je réalise. On est un peu intuitive et cette intuition est liée aux personnes, du fait que vivre est une jubilation. » Et elle ajoute : « les choses les plus importantes de ce monde : la nature, la lecture et les gens qui ont de l’élégance. » Dans cette édition de Cinélatino, le focus RéalisActrices présente Ana Katz et deux de ses films font partie de la programmation : Mi amiga del parque (2015) et El perro que no calla (2021). Occasion idéale pour découvrir le singulier univers de cette cinéaste. « Je crois en l’amour des liens et en la nature. Et je crois aussi que le monde est absurde. Voilà la situation... »
Paula Oróstica

Sources : « Sonámbulos », interview de Rodrigo Garay Ysita, décembre 2021 -  « El perro que no calla »: la vida resiliente de Ana Katz, Daniel de Partearroyo Cinemanía, 20 minutos.es. - Telam Se, juillet 2022. Telam digital.

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